mardi 13 novembre 2018

7OOème Anniversaire de la Collégiale Saint-Michel de Castelnaudary



Colloque du Samedi 3 novembre 2018 (théâtre des 3 ponts)

Les principales restaurations du XIXème et XXème siècle

La consultation du fonds moderne des Archives Départementales, municipales ou paroissiales concernant la Collégiale, ainsi que d’Archives privées et manuscrites, permet d’établir de façon chronologique ce que furent les principales restaurations qu’a subies le monument au XIXème et XXème siècles.

Dans son dossier préparatoire aux travaux de restauration de la toiture (1987 – 1989, Archives municipales) Mme Schmuckle-Mollard, Architecte en Chef des Monuments historiques retient d’abord, pour le XIXème, la date de 1826. La toiture est alors réparée après avoir enlevé une partie de la voûte en plancher ; on s’interroge sur la suite à donner : doit-on, pour voûter l’église en commençant par la 1ère travée, utiliser le plâtre ou le bois ? Ce sera le plâtre. (Archives Départementales 2J 152).

Albert Marfan (1) rapporte qu’au XVème siècle déjà la voûte avait été construite  «  en béton de plâtre et coques de maïs dépouillées de leurs grains ». On retrouvera des rafles de maïs mêlées au plâtre lors de la restauration de la voûte réalisée par l’Architecte en Chef, Mr Hermite, de 1972 à 1974.

Après la construction de la voûte en plâtre, le Curé de Lacger et le Conseil de Fabrique se sont livrés à des transformations dénoncées par le Conseil municipal dans la séance du 12 décembre 1831 : l’abside, le sanctuaire, le chœur, la nef furent recouverts de placages en plâtre et les ouvertures du chœur transformées en rosaces …

En 1859, la majeure partie des jeux de l’orgue de Jean-Pierre Cavaillé (construit de 1774 à 1778 ) sont muets, la soufflerie avec ses 3 soufflets produit un vent insuffisant, le mécanisme délabré est entièrement à refaire, le buffet fort simple est entièrement dénué d’ornement ; le Curé –Archiprêtre Joseph Saunières  et le Conseil de fabrique font appel à Aristide Cavaillé- Coll  (petit-fils de Jean-Pierre )  pour le faire restaurer et agrandir ; il exécute ce travail  de 1860 à 1862, portant le nombre de jeux de 26 à 39, ce qui nécessita une modification de la tribune et du buffet ; le nouveau buffet sera l’œuvre d’artisans locaux, selon les plans d’Aristide Cavaillé- Coll qui construisait à la même période l’orgue de la Cathédrale de Carcassonne  (2).

 En 1861, les combles de la nef tombant en ruine, la ville fournit l’effort de les faire réparer et à partir de cette date, la fabrique va s’attacher à rendre au monument son véritable caractère architectural, selon les conseils de l’Evêque de Carcassonne, Mgr de la Bouillerie, (3).

L’orgue nouveau est inauguré le 5 juin 1862 par Mr Leybach organiste de la cathédrale de Toulouse, appelé par la fabrique pour faire la réception : il comporte 2485 tuyaux et 39 jeux (4).  

 Le chœur et le sanctuaire sont « remis dans le style primitif » par l’Archiprêtre Joseph Saunières de 1858 à 1866 et concernent le remaniement du maître- autel, celui du chœur en forme d’hémicycle orné de fines colonnettes, le rétablissement des fenêtres géminées avec la réalisation de vitraux par le vitrailliste Victor Gesta, de Toulouse (5).

Les chapelles ont fait l’objet d’une restauration d’ensemble , de 1874 à 1880  sous le pastorat de l’Archiprêtre Eugène Sigé, selon les plans de l’architecte Charles de Capella qui les a rendues symétriques ; leurs arcades sont identiques en hauteur et largeur, leurs voûtes divisées en 4 voûtains, elles sont toutes éclairées par une rose dont le vitrail porte  en son centre le chiffre du saint patron, sauf celle de la Vierge qui est ornée d’une magnifique rosace dont les vitraux évoquent les 4 grands moments de la vie de la Vierge.

Cette restauration des 9 chapelles a duré 6 ans et coûté 80.000 frs (journal manuscrit de la Collégiale de 1847 à 1899). Comme le note Mme Scmuckle-Mollard, il s’est agi de « dérestauration »  puisqu’on est revenu au gothique  après les travaux de la fin du XVIIIème qui avaient consisté à habiller l’église en style classique et transformer les ouvertures.

En 1893, la coursive derrière les contreforts est recouverte de ciment VICAT pour assurer l’étanchéité ; la même année : « grâce aux libéralités d’une marguillère, les dalles de la nef qui étaient en très mauvais état sont recouvertes d’une faible couche de ciment VICAT  ( 0,5 cm) ; pour ne pas élever le niveau de l’église, il a fallu soulever les dalles et enlever 0, 5  cm  de terrain ; les dalles ont été placées sur un lit de mortier et piquées pour rendre l’adhésion du mortier plus facile ; les figures  ont été tracées selon les plans de l’Architecte de Capella.» (journal manuscrit de la Collégiale).

Le XXème siècle est heureusement abordé avec le classement de la Collégiale comme monument historique par Arrêté  Ministériel du 18 octobre 1910, aboutissement des démarches du Docteur Jean Mordagne, alors 1er Adjoint, puis Maire de Castelnaudary  2 ans plus tard. 

En 1912, l’Architecte Henri Nodet fait remanier la toiture, supprimer les lourds fleurons en céramique vernissée qui ornaient le faîtage de la nef ainsi que les lucarnes qui éclairaient les combles. (archives départementales O P 693- 4T604).

La restauration des toitures est à nouveau à l’ordre du jour en novembre 1937 : le ministre de l’éducation nationale, direction des beaux arts, adresse au préfet un devis prévoyant les couvertures « en tuiles plates du pays, de 1ère qualité, non gélives, fixées par des clous et un crochet spécial galvanisé » (archives municipales 11 W115).

 En 1938 un autre devis prévoit la réfection du dallage du choeur jugé hors d’usage ; le projet repris par Henri Nodet en janvier 1942, demeuré sans suite, a fait l’objet d’une relance, en 1980, encore sans résultat en 2018. (6)

L’année 1940 est consacrée au remplacement des socles et des fûts des arcs doubleaux mutilés en 1875 par le Curé Sigé afin d’installer le chemin de croix en bas-reliefs de Jean Duseigneur ; dix stations du chemin de croix sont ainsi déposées, seules 4 sont maintenues, les 1ère,  2ème, 13ème et 14ème  placées dans le chœur.

La décennie suivante  a comporté des travaux de grande ampleur  toujours sous l’autorité d’Henri Nodet : en 1953, dégagement complet de l’abside par la démolition de masures et d’une maison construite entre les contreforts ; restauration des contreforts avec la reconstitution des gargouilles sculptées de corps mythologiques, reconstruction  des pignons décorés de fleurons.

A la même date, le sommet de la flèche du clocher présentait un mouvement de dévers vers le nord-ouest qui faisait craindre un écroulement ; les travaux de restauration ont été réalisés en 2 tranches ( 1953- 1955) ; ils ont consisté en la dépose de la flèche sur une hauteur de 5 mètres, repose avec roue de serrage, rejointoiement, restauration de la balustrade et de la corniche de la partie octogonale, remplacement de la croix en fer forgé avec sa girouette ; ils ont été l’oeuvre de l’entreprise Sèle, sous l’autorité de Mr Chauvel, Inspecteur Général des monuments historiques et aussi Architecte en chef ; en 1956, Mr Donzet, Architecte en chef, a poursuivi les travaux par la restauration de l’escalier d’accès  au clocher et celle de la tour du guet. (archives privées et archives de l’Evêché, fonds  Maurice Mordagne qui a suivi les travaux  et en a rendu compte dans La Dépêche).

Au fil des décennies, de nombreux désordres apparus dans la toiture à tuiles plates dont la pente était trop grande (52%) ont endommagé fortement la voûte en plâtre dans la nef comme au-dessus des orgues ; l’Architecte en chef, Mr Hermite, a alors décidé de revenir à une voûte en bois en 1972-1974, réalisée par l’Entreprise Chevrin-Géli.

 En octobre  1972, l’orgue  d’Aristide Cavaillé-Coll (dont la partie instrumentale  a été  classée historique le 6 mai 1969 grâce aux démarches conjointes de Pierre Barthas, fondateur des Amis des orgues et de Jean- Pierre Cassabel, Député) est démonté en vue de sa restauration confiée d’abord à Schwenkedel puis à Formentelli ; il était quasiment hors d’usage : soufflets crevés, jeux muets, tuyaux effondrés ; le parti retenu par les experts a été  celui d’une restauration authentique, sans modification du plan Cavaillé-Coll. La mécanique, la soufflerie, la machine Barker ont été remis en état, les plans sonores rétablis, les jeux classiques et romantiques équilibrés et harmonisés en 1978 avec une inauguration par Pierre Cochereau le 12 janvier 1979. (Orgues de Castelnaudary, Les Amis des orgues 1999. Imp.  Siac. Carcassonne).

En1975, la couverture des chapelles sud et nord est remaniée.

En 1980, le Curé-Archiprêtre Henri Laffon a décidé, sur les conseils de Claude Seyte, spécialiste des carillons de l’Aude, de rénover le carillon  installé de 1821 à 1823 qui comportait 8 cloches composant une gamme diatonique ; il l’a fait porter à 23  en y incluant 7 cloches du carillon de l’église voisine St Jean et 8 nouvelles fondues par Paccard ; un 2ème agrandissement en avril 1982 a porté le nombre à 35 en en conservant  2 de 1821, celles de Brocard.

La dernière modification de la toiture, effectuée en 2 tranches (1987- 1989)  a été conduite par Mme Schmuckle-Mollard qui a abaissé le faîtage de 1m80, supprimant le grand comble et adoptant la tuile canal ; les travaux sont réalisés par l’entreprise Chevrin-Géli.

 Maire-Adjoint chargé de la conservation du patrimoine, j’ai engagé une campagne de remise en état du décor des 5 chapelles sud, menée de 1990 à 1995, par un accord Ville-Monuments historiques, à raison d’une  chapelle par an, sous l’autorité de Mr Olivier Poisson, Inspecteur des monuments historiques ; les travaux ont été réalisés par l’atelier d’Assalit, de Toulouse. (La Collégiale St Michel, Francis Falcou, Les Amis de Castelnaudary, Imprimerie du Lauragais.  2012).

La rénovation  du couvert de l’abside a été l’œuvre en 1994  de Mr Régis Martin, Architecte en chef, qui a ramené la pente de 100 % à 58 %  et remplacé la tuile plate par la tuile canal. Les travaux ont été exécutés par l’Entreprise Chevrin-Géli et Toitures Midi-Pyrénées. (Archives municipales).

 La restauration  du décor des chapelles nord , interrompue  après les élections municipales de 1995, a repris en 1999 par la  chapelle  du Sacré Cœur suivie de celle de St Jean Baptiste en 2000,  de celle des morts de la 1ère guerre mondiale en 2008. 

 Membre fondateur des Amis des orgues en 1967  puis Président  de 1995 à 2007, je me suis attaché à rédiger l’historique du buffet  de l’orgue d’Aristide  Cavaillé-Coll puis à  faire restaurer aux frais de l’Association et grâce au mécénat, l’ensemble de la statuaire qui avait souffert  des travaux de réfection de la voûte  car le buffet  n’avait pas été « emmailloté » et n’avait pas été classé en 1969 ;  si les 3 angelots qui ornent le positif de dos avaient été reconstitués en 1977 par le sculpteur Alamelle, St Michel qui couronne  le buffet avait perdu un bras et sa lance ;  Ste Cécile sa lyre, le roi David sa harpe ; les 8 statues qui ornent  les 8 tourelles  ont été restaurées en 1997-1998, leurs attributs dorés à la feuille par Maurice Jourdain , artiste décorateur à Toulouse, avec l’accord des monuments historiques (7) .

La célébration du 7ème centenaire est une excellente occasion pour poursuivre les chantiers  de restaurations des siècles passés : celle du baptistère, en cours, est un bel exemple de cette volonté.

                                                                                                                                  Francis Falcou,

Membre fondateur des Amis de Castelnaudary et du Lauragais en 1964, Président depuis 1983. 



 Notes : 1 :  Albert Marfan :  Notes sur l’église Collégiale de St Michel de Castelnaudary ; imprimerie du sud-ouest, Castelvi, Toulouse, 1941.

            2 : Registre des dépenses de l’église St Michel de 1848 à 1880. (Archives municipales).

            3 : Mgr de La Bouillerie, Evêque de Carcassonne de 1855 à 1873 ; ses armoiries peintes sur le dernier panneau bas du vitrail central du chœur sont : « de gueules, au chevron d’or accompagné de 3 pommes de pin de même, posées 2 en chef, 1 en pointe ».

            4 : Journal des faits saillants accomplis dans l’église St Michel de 1847 à 1899, (manuscrit) et archives municipales M 66.

            5 : Victor Gesta, vitrailliste Toulousain de 1850 à 1894, a signé les vitraux qui ornent les 2 fenêtres surmontant les portes d’entrée de l’église, sous la tribune.

            6 : Lettre de l’Architecte des bâtiments de France de Carcassonne, Charles Bourrély datée du 29 octobre 1980.

            7 : Lettre du Conservateur régional des monuments historiques du 10 février 1998.

Les statues du baptistère de la Collégiale, restaurées à l'initiative et aux frais de l'Association, le mur  l'étant par la ville  dans le cadre de cette  commémoration