Colloque du Samedi 3
novembre 2018 (théâtre des 3 ponts)
Les principales
restaurations du XIXème et XXème siècle
La consultation du fonds moderne
des Archives Départementales, municipales
ou paroissiales concernant la Collégiale, ainsi que d’Archives privées et
manuscrites, permet d’établir de façon chronologique ce que furent les
principales restaurations qu’a subies le monument au XIXème et XXème siècles.
Dans son dossier préparatoire aux
travaux de restauration de la toiture
(1987 – 1989, Archives municipales) Mme Schmuckle-Mollard, Architecte en
Chef des Monuments historiques retient d’abord, pour le XIXème, la
date de 1826. La toiture est alors réparée
après avoir enlevé une partie de la voûte en plancher ; on s’interroge sur
la suite à donner : doit-on, pour voûter l’église en commençant par la 1ère
travée, utiliser le plâtre ou le bois ? Ce sera le plâtre. (Archives
Départementales 2J 152).
Albert Marfan (1) rapporte qu’au
XVème siècle déjà la voûte avait été construite « en béton
de plâtre et coques de maïs dépouillées de leurs grains ».
On retrouvera des rafles de maïs mêlées au plâtre lors de la restauration de la
voûte réalisée par l’Architecte en Chef, Mr Hermite, de 1972 à 1974.
Après la construction de la voûte
en plâtre, le Curé de Lacger et le Conseil de Fabrique se sont livrés à des
transformations dénoncées par le Conseil municipal dans la séance du 12
décembre 1831 : l’abside, le sanctuaire, le chœur, la nef furent
recouverts de placages en plâtre et les ouvertures du chœur transformées en
rosaces …
En 1859, la majeure partie des jeux de l’orgue de Jean-Pierre Cavaillé (construit de 1774 à 1778 )
sont muets, la soufflerie avec ses 3 soufflets produit un vent insuffisant, le
mécanisme délabré est entièrement à refaire, le buffet fort simple est
entièrement dénué d’ornement ; le Curé –Archiprêtre Joseph Saunières et le Conseil de fabrique font appel à Aristide
Cavaillé- Coll (petit-fils de
Jean-Pierre ) pour le faire restaurer
et agrandir ; il exécute ce
travail de 1860 à 1862, portant
le nombre de jeux de 26 à 39, ce qui nécessita une modification de la
tribune et du buffet ; le nouveau buffet sera l’œuvre d’artisans locaux,
selon les plans d’Aristide Cavaillé- Coll qui construisait à la même période
l’orgue de la Cathédrale de Carcassonne
(2).
En 1861, les combles de la nef tombant en ruine, la ville fournit l’effort
de les faire réparer et à partir de cette date, la fabrique va s’attacher à
rendre au monument son véritable caractère architectural, selon les
conseils de l’Evêque de Carcassonne, Mgr de la Bouillerie, (3).
L’orgue nouveau est inauguré le 5 juin 1862 par Mr Leybach organiste
de la cathédrale de Toulouse, appelé par la fabrique pour faire la réception :
il comporte 2485 tuyaux et 39 jeux (4).
Le chœur et le sanctuaire
sont « remis dans le style primitif » par l’Archiprêtre Joseph
Saunières de 1858 à 1866 et concernent le remaniement du maître- autel,
celui du chœur en forme d’hémicycle orné de fines colonnettes, le
rétablissement des fenêtres géminées avec la réalisation de vitraux par le
vitrailliste Victor Gesta, de Toulouse (5).
Les chapelles ont fait l’objet d’une restauration d’ensemble , de
1874 à 1880 sous le pastorat de
l’Archiprêtre Eugène Sigé, selon les plans de l’architecte Charles de Capella
qui les a rendues symétriques ; leurs arcades sont identiques en hauteur
et largeur, leurs voûtes divisées en 4 voûtains, elles sont toutes éclairées par
une rose dont le vitrail porte en son
centre le chiffre du saint patron, sauf celle de la Vierge qui est ornée d’une
magnifique rosace dont les vitraux évoquent les 4 grands moments de la vie de
la Vierge.
Cette restauration des 9 chapelles
a duré 6 ans et coûté 80.000 frs (journal manuscrit de la Collégiale de 1847 à 1899).
Comme le note Mme Scmuckle-Mollard, il s’est agi de « dérestauration »
puisqu’on est revenu au gothique
après les travaux de la fin du XVIIIème qui avaient consisté à habiller
l’église en style classique et transformer les ouvertures.
En 1893, la coursive derrière les contreforts est recouverte de ciment
VICAT pour assurer l’étanchéité ; la même année : « grâce
aux libéralités d’une marguillère, les dalles de la nef qui étaient en très
mauvais état sont recouvertes d’une faible couche de ciment VICAT ( 0,5 cm) ; pour ne pas élever le niveau
de l’église, il a fallu soulever les dalles et enlever 0, 5 cm de terrain ; les dalles ont été
placées sur un lit de mortier et piquées pour rendre l’adhésion du mortier plus
facile ; les figures ont été
tracées selon les plans de l’Architecte de Capella.» (journal manuscrit de la
Collégiale).
Le XXème siècle est heureusement abordé avec le classement de la Collégiale
comme monument historique par Arrêté Ministériel du 18 octobre 1910, aboutissement des démarches
du Docteur Jean Mordagne, alors 1er Adjoint, puis Maire de
Castelnaudary 2 ans plus tard.
En 1912, l’Architecte Henri Nodet fait remanier la toiture,
supprimer les lourds fleurons en céramique vernissée qui ornaient le faîtage de
la nef ainsi que les lucarnes qui éclairaient les combles. (archives
départementales O P 693- 4T604).
La restauration des toitures est à
nouveau à l’ordre du jour en novembre 1937 : le ministre de l’éducation
nationale, direction des beaux arts, adresse au préfet un devis prévoyant les
couvertures « en tuiles plates du pays, de 1ère qualité, non
gélives, fixées par des clous et un crochet spécial galvanisé » (archives
municipales 11 W115).
En 1938 un autre devis prévoit la réfection du
dallage du choeur jugé hors d’usage ; le projet repris par Henri Nodet en
janvier 1942, demeuré sans suite, a fait l’objet d’une relance, en 1980, encore
sans résultat en 2018. (6)
L’année 1940 est consacrée au remplacement des socles et des fûts
des arcs doubleaux mutilés en 1875 par le Curé Sigé afin d’installer le chemin
de croix en bas-reliefs de Jean Duseigneur ; dix stations du chemin de
croix sont ainsi déposées, seules 4 sont maintenues, les 1ère, 2ème, 13ème et 14ème
placées dans le chœur.
La décennie suivante a comporté des travaux de grande
ampleur toujours sous l’autorité d’Henri Nodet : en 1953, dégagement complet de l’abside par la démolition de masures et d’une
maison construite entre les contreforts ; restauration des contreforts avec la reconstitution des
gargouilles sculptées de corps mythologiques, reconstruction des pignons
décorés de fleurons.
A la même date, le sommet de la flèche du clocher présentait
un mouvement de dévers vers le nord-ouest qui faisait craindre un
écroulement ; les travaux de restauration ont été réalisés en 2 tranches (
1953- 1955) ; ils ont consisté en la dépose de la flèche sur une hauteur
de 5 mètres, repose avec roue de serrage, rejointoiement, restauration de la
balustrade et de la corniche de la partie octogonale, remplacement de la croix
en fer forgé avec sa girouette ; ils ont été l’oeuvre de l’entreprise
Sèle, sous l’autorité de Mr Chauvel, Inspecteur Général des monuments
historiques et aussi Architecte en chef ; en 1956, Mr Donzet, Architecte
en chef, a poursuivi les travaux par la restauration de l’escalier d’accès au clocher et celle de la tour du guet.
(archives privées et archives de l’Evêché, fonds Maurice Mordagne qui a suivi les travaux et en a rendu compte dans La Dépêche).
Au fil des décennies, de nombreux
désordres apparus dans la toiture à tuiles plates dont la pente était trop
grande (52%) ont endommagé fortement la voûte en plâtre dans la nef comme
au-dessus des orgues ; l’Architecte en chef, Mr Hermite, a alors décidé de
revenir à une voûte en bois en 1972-1974,
réalisée par l’Entreprise Chevrin-Géli.
En
octobre 1972, l’orgue d’Aristide Cavaillé-Coll (dont la partie
instrumentale a été classée historique le 6 mai 1969 grâce aux
démarches conjointes de Pierre Barthas, fondateur des Amis des orgues et de
Jean- Pierre Cassabel, Député) est démonté
en vue de sa restauration confiée d’abord à Schwenkedel puis à
Formentelli ; il était quasiment hors d’usage : soufflets crevés,
jeux muets, tuyaux effondrés ; le parti retenu par les experts a été celui d’une restauration authentique, sans modification du plan Cavaillé-Coll.
La mécanique, la soufflerie, la machine Barker ont été remis en état, les plans
sonores rétablis, les jeux classiques et romantiques équilibrés et harmonisés
en 1978 avec une inauguration par Pierre Cochereau le 12 janvier 1979.
(Orgues de Castelnaudary, Les Amis des orgues 1999. Imp. Siac.
Carcassonne).
En1975, la couverture des chapelles
sud et nord est remaniée.
En 1980, le Curé-Archiprêtre Henri Laffon a décidé, sur les conseils
de Claude Seyte, spécialiste des carillons de l’Aude, de rénover le carillon installé de 1821 à 1823 qui comportait 8
cloches composant une gamme diatonique ; il l’a fait porter à 23 en y incluant 7 cloches du carillon de
l’église voisine St Jean et 8 nouvelles fondues par Paccard ; un 2ème
agrandissement en avril 1982 a porté le nombre à 35 en en conservant 2 de 1821, celles de Brocard.
La dernière
modification de la toiture, effectuée en 2 tranches (1987- 1989) a été conduite
par Mme Schmuckle-Mollard qui a abaissé le faîtage de 1m80, supprimant le grand
comble et adoptant la tuile canal ; les travaux sont réalisés par
l’entreprise Chevrin-Géli.
Maire-Adjoint chargé de la conservation du
patrimoine, j’ai engagé une campagne de remise
en état du décor des 5 chapelles sud, menée de 1990 à 1995, par un
accord Ville-Monuments historiques, à raison d’une chapelle par an, sous l’autorité de Mr Olivier
Poisson, Inspecteur des monuments historiques ; les travaux ont été
réalisés par l’atelier d’Assalit, de Toulouse. (La Collégiale St Michel, Francis
Falcou, Les Amis de Castelnaudary, Imprimerie du Lauragais. 2012).
La rénovation du couvert de l’abside a été l’œuvre en 1994 de Mr Régis
Martin, Architecte en chef, qui a ramené la pente de 100 % à 58
% et remplacé la tuile plate par la
tuile canal. Les travaux ont été exécutés par l’Entreprise Chevrin-Géli et
Toitures Midi-Pyrénées. (Archives municipales).
La restauration du décor des chapelles nord ,
interrompue après les élections
municipales de 1995, a repris en 1999 par la
chapelle du Sacré Cœur suivie de
celle de St Jean Baptiste en 2000, de
celle des morts de la 1ère guerre mondiale en 2008.
Membre fondateur des Amis des orgues en 1967 puis Président
de 1995 à 2007, je me suis attaché à rédiger l’historique du
buffet de l’orgue d’Aristide Cavaillé-Coll puis à faire restaurer
aux frais de l’Association et grâce au mécénat, l’ensemble de la statuaire qui avait souffert des travaux de réfection de la voûte car le buffet
n’avait pas été « emmailloté » et n’avait pas été classé
en 1969 ; si les 3 angelots qui
ornent le positif de dos avaient été reconstitués en 1977 par le sculpteur
Alamelle, St Michel qui couronne le
buffet avait perdu un bras et sa lance ;
Ste Cécile sa lyre, le roi David sa harpe ; les 8 statues qui
ornent les 8 tourelles ont été restaurées en 1997-1998, leurs attributs dorés à la feuille par Maurice
Jourdain , artiste décorateur à Toulouse, avec l’accord des monuments
historiques (7) .
La célébration du 7ème
centenaire est une excellente occasion pour poursuivre les chantiers de restaurations des siècles passés :
celle du baptistère, en cours, est un bel exemple de cette
volonté.
Francis Falcou,
Membre fondateur des Amis de Castelnaudary et du Lauragais en 1964, Président
depuis 1983.
Notes : 1 : Albert Marfan : Notes sur l’église Collégiale de St Michel de
Castelnaudary ; imprimerie du sud-ouest, Castelvi, Toulouse, 1941.
2 :
Registre des dépenses de l’église St Michel de 1848 à 1880. (Archives
municipales).
3 : Mgr de La
Bouillerie, Evêque de Carcassonne de 1855 à 1873 ; ses armoiries peintes
sur le dernier panneau bas du vitrail central du chœur sont : « de
gueules, au chevron d’or accompagné de 3 pommes de pin de même, posées 2 en
chef, 1 en pointe ».
4 :
Journal des faits saillants accomplis dans l’église St Michel de 1847 à 1899, (manuscrit)
et archives municipales M 66.
5 :
Victor Gesta, vitrailliste Toulousain de 1850 à 1894, a signé les vitraux qui
ornent les 2 fenêtres surmontant les portes d’entrée de l’église, sous la
tribune.
6 :
Lettre de l’Architecte des bâtiments de France de Carcassonne, Charles Bourrély
datée du 29 octobre 1980.
7 :
Lettre du Conservateur régional des monuments historiques du 10 février 1998.
Les statues du
baptistère de la Collégiale, restaurées à l'initiative et aux frais de
l'Association, le mur l'étant par la ville dans le cadre de
cette commémoration